Un chef étoilé ose le varech dans l'assiette

Alors que dans notre imaginaire embrumé, un chef, ça ne cuisine forcément qu'avec des ingrédients nobles, un cuisinier triplement étoilé s'intéresse à une algue des plus communes : le varech. Une plante aux premiers abords banale, mais, semble-t-il, à l'énorme potentiel.
Un chef étoilé ose le varech dans l

Du varech marin (zostera marina), on en voit chaque fois que l'on part en vacances en bord de mer. Si, si, vous savez, cette "herbe" marine bien dressée sur le fond marin et qui ondule au gré des courants. On la regarde à peine, mais elle est très importante sous l'eau en offrant abri et lieu de reproduction aux animaux, en stabilisant les sédiments, ou encore en distillant de l'oxygène dans le milieu marin. En la regardant de plus près, un observateur attentif notera également qu'elle produit de tout petits grains ressemblant à des grains de riz, mais verts. Ángel León, lui, l'a remarqué et ça a attisé sa curiosité.

Ángel León est un chef cuisinier espagnol un peu atypique. Ayant décroché sa première étoile au guide Michelin en 2010 et sa troisième 7 ans plus tard, il a ouvert son restaurant, "Aponiente", avec une idée en tête : n'y servir que de bas produits de la mer, ceux considérés comme ayant peu de valeur. Ángel León s'est donc fait un nom en servant des plats atypiques comme des chorizos concoctés avec des chutes de découpe de poisson. En voyant les grains du varech, "el Chef del mar" comme on l'appelle (le Chef de la mer) s'est donc très naturellement dit qu'il y avait là matière à moudre. Et il avait raison.

Les grains de zostera marina sont comestibles et, mieux, ils contiennent aussi de la vitamine A et de la vitamine E, introuvables naturellement dans n'importe quelle autre céréale. Ils contiennent également plusieurs acides aminés essentiels, de l'oméga 5 et 9 ainsi que moitié plus de protéines que dans le riz commun. En gros, ils sont une meilleure alternative que ce dernier. En cuisine, les grains cuisent en à peine 2 minutes de plus et dans l'assiette, ils ont alors une texture ferme et dense avec un goût de riz brun iodé. Pour varier les plaisirs, le cuisinier en a également fait de la farine dont il se sert pour concocter du pain ou fabriquer des pâtes.

Forcément écologiste dans l'âme, le chef Ángel León voit maintenant dans le varech une nouvelle manière de nourrir le monde. C'est littéralement du riz qui ne nécessite ni engrais, ni produits chimiques pour pousser, juste de l'eau de mer. Mieux : plutôt que de consommer des ressources, sa culture fait du bien à la planète, en oxygénant les océans par exemple.

Publié le 02/07/2021

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